El-Kadada

Sauvetage de nécropoles néolithique et méroïtique près de Shendi 1976-1986

Sous la direction de Francis Geus.

Equipe : Jacques Reinold, Patrice Lenoble, Yves Lecointe, Pascal Ginailhac, Daniel Connoioux, René Pierre Dissaux, Pierre Vandeplanque, Denis Piponnier, Annick Duflos, Paul Koren, Max Schvoerer, Claude Ney, Anne Rouannet, Florence Thill, Paul De Paepe, Sid Ahmed Kamier, Mohamed Hassan Basha, Khalil Mohamed Khalil, Salah Omer es Sadiq, Khider Adam Eisa, Damri Mohamed Abdel Latif, Amum Tor Akayding, Salah Mohamed Ahmed, Gamal el Din Mohamed Idriss.

Découvert en 1976, el-Kadada est l’un des rares sites néolithiques connus dans la région de Shendi.

Les plus anciennes traces d’occupation sont des tessons de vase céramique dont le décor wavy line indique un peuplement au « Mesolithique de Khartoum », bien qu’aucun site de cette période n’ait été découvert. La période de transition suivante est attestée par des tessons dotted wavy line identifiés sur un petit habitat, au lieu-dit el-Kudra, situé à moins de 200m de là. Il n’y a, par contre, aucune trace d’occupation à l’époque du Néolithique de Khartoum, daté du cinquième millénaire avant notre ère. Il semble que les installations préhistoriques de cette période se soient déplacées vers le site d’el-Ghaba, 700 m plus au sud. Le décor du matériel céramique trouvé dans les tombes d’el-Ghaba est comparable à celui des vases d’esh-Shaheinab, site éponyme du Néolithique de Khartoum. La découverte des tombes néolithiques d’el-Kadada est venue confirmer la suggestion de l’archéologue anglais A.J. Arkell, l’inventeur du Mésolithique et du Néolithique de Khartoum, d’un épisode préhistorique tardif. Les populations néolithiques d’el-Kadada ont développé à partir du quatrième millénaire une culture complexe qui se traduit dans le raffinement des décors céramiques et la nouveauté des formes, la finesse de l’outillage lithique, et la grande richesse des dépôts funéraires.

El-Kadada recèle également un grand nombre de cimetières historiques, depuis la période napatéenne jusqu’au post-méroïtique, du huitième siècle avant notre ère jusqu’au sixième siècle après. Le matériel funéraire et le rituel des tombes pré-chrétiennes révèlent que la religion funéraire méroïtique ne s’achève pas avec la “fin de Méroé” mais avec le début de la christianisation, au VIe siècle de notre ère.

Éléments de bibliographie

P. Lenoble, « Enterrer les flèches, enterrer l’Empire. II, Les archers d’el-Kadada et l’administration de l’imperium méroïtique », CRIPEL 20, 1999, pp. 125-144.

J. Reinold, « Les fouilles françaises et franco-soudanaises : el-Kadada », dans Nubie. Les cultures antiques du Soudan (B. Gratien et F. Le Saout éd.), Lille, 1994, p. 51-66.

P. Lenoble, « Trois tombes de la région de Méroé : la clôture des fouilles historiques d’el-Kadada en 1985 et 1986 », Archéologie du Nil moyen 2, 1987, p. 89-119.

J. Reinold, « Le nécropole néolithique d’el-Kadada au Soudan central, quelques cas de sacrifices humains », sans Nubische Studien (M. Krause éd.), Mayence, 1986, p. 159-169.

J. Reinold, « La nécropole néolithique d’el-Kadada au Soudan ; les inhumations d’enfants en vase », Mélanges J. Vercoutter, Paris ADPF, 1985, p. 279-289.

Fr. Geus et P. Lenoble, « Évolution du cimetière méroïtique d’el-Kadada : la transition vers le postméroïtique en milieu rural méridional », Mélanges J. Vercoutter, Paris ADPF, 1985, p. 67-92.

Fr. Geus, Rescuing Sudan Ancient Cultures, A Cooperation between France and the Sudan in the Field of Archaeology, Khartoum 1984.

Fr. Geus, « El-Kadada ; une civilisation du 4e millénaire sur les rives du Nil soudanais », Archéologia n° 170, p. 24-33.

Fr. Geus et J. Reinold, « Fouilles de sauvetage à el-Kadada (Soudan). I. La campagne d’avril 1976 », CRIPEL 5, 1979, p. 7-157.

Vase caliciforme. Terre cuite.
Haut. 27,7 cm, diam. max. 23,4 cm, diam. min. 5,4 cm.
El-Kadada. Néolithique.
© J. Reinold et alii, Archéologie au Soudan, éditions Errance, Paris 2000.

Petit conteneur à parfum servant à l’onction funéraire. SNM 25680 et 26466.
Terre cuite.
El-Kadada. Époque méroïtique.
© J. Reinold et alii, Archéologie au Soudan, éditions Errance, Paris 2000.

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(2008)

Le préhistorien Jacques Reinold, chercheur associé à la SFDAS à Khartoum, vient de faire une découverte exceptionnelle au Soudan, dans la vaste nécropole néolithique d’el-Kadada (région de Shendi).
Dans l’une des 300 tombes fouillées par l’archéologue est apparu un personnage vieux de 5.500 ans, accompagné de trois humains sacrifiés lors des cérémonies funéraires.
Le défunt était probablement déposé dans une construction de bois, ce qui est unique pour une époque aussi ancienne, et la tombe a livré un mobilier très riche.
Un ensemble de sépultures disposées tout autour sont actuellement en cours de dégagement. Elles aussi contiennent un matériel, notamment céramique, d’une qualité remarquable.
La question du sacrifice humain (ou morts d’accompagnement) dans la vallée du Nil est très débattue par les spécialistes. Avec cette découverte, qui atteste sans nul doute cette pratique, en même temps qu’elle indique la possibilité de l’existence d’une chambre funéraire, ce sont les recherches fondamentales sur l’organisation des sociétés préhistoriques et sur les étapes de la formation des états qui se trouvent relancées.
Jacques Reinold, ancien directeur de la SFDAS, fouille depuis de nombreuses années au Soudan. Il est l’un des meilleurs spécialistes du Néolithique africain.

Prehistorian Jacques Reinold, researcher on behalf of the French Archaeological Unit in Khartoum has made an exceptional discovery in the large Neolithic necropolis of El-Kadada (Shendi Region).
In one of the 300 tombs excavated, the archaeologist discovered a 5,500 year old man in the company of three other persons; the three people were sacrified during the funeral of the main person.
The buried man was perhaps installed in a wooden structure, which is unique for such a remote period, and the tomb is rich in important equipment.
The group of graves organized around the main one are currently being studied. They also display an important series of objects, including ceramics of great quality.
The question of human sacrifice in the Nile Valley is much debated by specialists. This discovery proves this practice beyond doubt, provides some evidence of a funerary chamber, and enhances fundamental research on the organization of prehistorical societies and on the phases of developping states.
Jacques Reinold is a former director of the French Unit and one of the most prominent specialists of the African Neolithic period.


L’archéologue Jacques Reinold avec la presse.
V. Francigny © SFDAS


Salah Eldin Mohamed Ahmed, directeur des fouilles à la NCAM.
V. Francigny © SFDAS


Le site de la fouille.
V. Francigny © SFDAS


Devant la tombe principale de la nécropole.
V. Francigny © SFDAS


Céramique néolithique provenant du site.
V. Francigny © SFDAS